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N@irolf nous a quitté en
2003.
Longtemps, il a figuré parmi les BDAs les plus actifs du site et c'est donc en toute logique qu'un dossier lui est aujourd'hui consacré dans le cadre des « dix ans de BDA ».
Son frère ThaN, également scénariste et dessinateur, a gentiment accepté de répondre à nos questions.
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Quelle place occupait la pratique de la bande
dessinée dans le quotidien de N@irolf ?
La BD a toujours eu une place importante pour nous deux.
On s’est plongé dans cet univers très tôt et on a grandi avec les
héros qu’on aimait. Mon père m’a raconté que tout petit, il
arrivait déjà à dessiner des petits véhicules en perspective, et c’est
vraiment par là qu’il a commencé le dessin. Passionné de courses
automobiles et en particulier de Formule 1 et de Senna, il dessinait à
l’adolescence voitures sur voitures avant de s’essayer à des BD et
des illustrations. Avec l’arrivée d’Internet, il a cherché des
communautés BD, et a trouvé BDA. A partir de ce jour, la BD occupait
véritablement chaque journée de sa vie et a été un formidable
exutoire à sa maladie. Il était un vrai passionné et se dépensait
en ce qu’il croyait, que ce soit en terme de BD, de politique ou d’actions
sociales comme le téléthon, ce qui lui permettait de s’évader et de
ne pas y penser en permanence.
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De quels auteurs professionnels se sentait-il le plus proche ?
Incontestablement Gotlib, avec un humour décalé, et des histoires
ou des situations burlesques. Son dessin a été très inspiré de ce
Grand auteur. Il était aussi très proche de l’univers de Simon
Léturgie. Il en est devenu fan dès qu’il a lu « Spoon and
White » et ce n’est pas si surprenant quand on lit « Les
Histoires Poilantes » qui racontent l’histoire d’un détective
privé un peu farfelu. Lorsque Simon a accepté de devenir le parrain de
ChacalProd, Florian en a été fier et heureux.
Sais-tu ce qui lui a donné l'envie de participer à
l'aventure BDA ?
L’envie de partager sa passion, je suppose. Il dessinait
énormément, mais ne pouvait échanger qu’avec moi, notre cousin
Cédric ou ses amis. Il a du avoir envie de rencontrer d’autres
personnes qui aient la même passion, pour progresser et faire
progresser et avant tout pour qu’il y ait un vrai échange entre
passionnés. Il aimait le monde de la BD et voulait donner ce qu’il
pouvait à cet univers.
Comment percevait-il le site ?
Je pense qu’il voyait BDA comme un formidable vivier de
passionnés. Il s’agissait pour lui d’un « site de
rencontres » autour de la BD au final. Il aimait faire de
nouvelles rencontres, principalement artistiques mais aussi amicales, et
il avait activement participé à rendre réelles ces rencontres
virtuelles en faisant un rassemblement BDA sur Paris. ChacalProd en a
été le reflet aussi quelque temps après et reste aujourd’hui le
symbole de ce qu’il voulait : un groupe d’amis réunis autour d’une
même passion, qui prennent un énorme plaisir à se retrouver et qui s’entraident.
C’est ainsi qu’il concevait chaque chose dans lesquelles il s’engageait,
il aimait connaître les gens, et lui-même laissait forcément sa trace
partout où il passait, il ne laissait jamais indifférent.
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Peux-tu nous parler des relations qu'il entretenait avec
différents membres de BDA ?
A cette époque j’étais un petit peu à l’écart de tout cet
univers, je dessinais un peu et je participais de temps en temps sur BDA,
mais je n’étais pas très présent et j’aurais un peu de mal à
parler vraiment des relations avec différents membres. Il est certain
que tous ceux qui ont participé à l’aventure ChacalProd par la
suite, dont beaucoup étaient sur BDA également, avaient pris une
grande part dans sa vie. La plupart d’entre eux étaient devenus de
vrais amis, presque des membres de sa famille.
Etait-il plutôt scénariste ou plutôt dessinateur ?
Principalement dessinateur. Il aimait en tous les cas avoir des
idées nouvelles auxquelles il n’aurait pas pensé tout seul. Il
aimait l’humour, il était souvent drôle, parfois grinçant et
forcément, les histoires qu’il faisait étaient la représentation de
son univers comique. Dans les Histoires Poilantes, il soumettait les
idées de base auxquelles venaient se greffer celles de notre cousin
(Cédric alias Tungshing) qui était le co-scénariste. En revanche,
pour des histoires moins humoristiques, il avait besoin de scénaristes,
comme ce fut le cas avec Nicodrën dont il adorait le travail. Je pense
qu’il avait suffisamment d’idées pour pouvoir inventer de nouveaux
scénarios, mais il manquait à l’époque de structure scénaristique
que pouvaient lui apporter des vrais scénaristes.
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D'où est venue l'idée de créer « Chacalprod » ?
Même s’il a participé activement à BDA, Florian voulait son
« Bébé ». Il aimait être l’instigateur de nouvelles
idées, de nouvelles associations, et il se donnait toujours à fond.
Partout où il est passé il a posé sa marque, que ce soit dans son
ancien lycée, sur Internet ou dans son action politique. Lorsqu’il s’engageait
dans quelque chose il le faisait à fond, il avait une imagination
débordante, il voulait toujours faire plus, aller plus loin.
Déjà au lycée il avait pensé à faire un petit regroupement avec des
amis à lui, qu’il avait appelé Antarès Production déjà à l’époque.
Des amis à qui il avait transmis sa passion ou qui l’avaient déjà
également, je pense vraiment que la mise en place d’une asso autour
de la BD lui trottait dans la tête depuis pas mal de temps, mais il n’avait
pas en main tout ce qu’il lui fallait. Avec BDA, son rêve est devenu
possible, notamment après sa rencontre avec Baril.
En tout les cas, il n’a jamais pensé faire de ChacalProd un
concurrent à BDA, mais plutôt une espèce de complément, qui pouvait
lui apporter des choses nouvelles. BDA était une communauté telle, qu’il
était difficile, voire impossible, d’en faire une véritable
structure. Il s’agissait d’une vitrine pour auteurs amateurs. Ce qu’il
voulait c’était de mettre en place une structure qui permettrait à
terme d’exister dans le monde réel, sur les salons, et de pouvoir
lancer de beaux ouvrages des membres, mais avant tout fonder une petite
famille autour de la BD qui prendrait plaisir à se retrouver
régulièrement. C’est la raison pour laquelle aussi il tenait aux
campings chacaliens et que j’avais tenu à maintenir celui qui avait
suivi sa disparition parce qu’il la voulait à tout prix. Les
relations humaines lui tenaient particulièrement à cœur, il
avait besoin de connaître vraiment les gens pour les apprécier au
mieux.
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Et toi à l'époque, comment vivais-tu tout cela ?
Au début je le suivais parce qu’il me le demandait. Je pense que
c’est lui qui m’a donné l’envie de dessiner quand j’étais au
collège. Je le voyais faire, je m’y suis mis également, et petit à
petit il m’a entraîné dans son sillage. Il m’a fait venir sur BDA
puis il m’a demandé d’intégrer les membres fondateurs de
ChacalProd. Mais c’est vrai que je l’ai fait avant tout pour lui
plus que par passion à cette époque. Même si je n’étais pas très
impliqué dans toute cette aventure, je suivais au jour le jour ce qui
se passait, la façon dont il gérait tout, l’énergie qu’il
déployait pour donner vie à ChacalProd, et je pense qu’il m’a
transmis l’envie de m’impliquer plus tard dans différentes assos.
Paradoxalement, je me suis beaucoup plus investi dans ChacalProd après
sa disparition. Pour moi il est l’âme de cette asso, et c’est
sûrement une façon de l’avoir toujours à mes côtés aujourd’hui.
La disparition de l’asso aurait été un second coup de poignard, il
fallait que je me batte pour qu’elle continue d’exister pour lui,
même dans les moments difficiles qu’il y a pu y avoir, et
heureusement qu’il y avait des gens excellents dans cette asso,
aujourd’hui devenus de vrais amis également, et qui ont permis de
prolonger l’aventure ChacalProd. |
Que préfères-tu dans la production de ton frère ?
Les Histoires Poilantes, parce qu’il s’agissait d’un projet
familial. Comme je l’ai précisé tout à l’heure mon cousin était
co-scénariste, et il m’arrivait aussi d’apporter de temps en temps
ma petite pierre à l’édifice. L’histoire partait en sucette
régulièrement, il y avait des rebondissements incongrus, on voyait là
tout l’univers totalement décalé de Florian.
Considères-tu, aujourd'hui, qu'il t'a influencé ou pas ?
C’est évident. Qui n’a-t-il pas influencé du tout parmi ceux
qui l’ont côtoyé ? Regardez, sur BDA il est toujours là, même
5 ans après sa disparition, il est resté dans les mémoires de ceux
qui fréquentaient cette communauté avant 2003. En ce qui me concerne,
il m’a transmis la passion du dessin, il m’a transmis l’envie de m’impliquer
et de m’investir vraiment dans des assos, il m’a donné une certaine
structure. Je pense avoir récupéré une partie d’énergie qu’il
dispersait tout autour de lui, même si je suis encore loin de tout ce
qu’il pouvait faire. Même dans la maladie il était cent fois plus
actif que n’importe qui, peut-être trop par moment aussi, mais c’est
ce qu’il lui fallait. Il savait qu’il vivait avec une épée de
Damoclès, il voulait profiter à fond de chaque moment présent. En
parallèle des cours, où il s’est battu pour obtenir son Master en
droit des affaires internationales, il s’investissait avec tant de
courage dans tellement de choses malgré la maladie, les traitements et
la fatigue… Pour cela, il est évident qu’il restera pour moi un
exemple à jamais.
Pour en savoir plus : http://www.cybernairolf.fr.st/ |
Interview de Philippe Gorgeot
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